Ce travail porte sur le devenir des derniers espaces ruraux français, particulièrement ceux de la région des Combrailles, dans le département de la Creuse.

Le territoire d'étude correspond à la commune de Chard, 200 habitants sur 1400 Ha, 8 entreprises, et 16 exploitations agricoles, située dans les Hautes-Combrailles, sur des collines au relief marqué, au milieu desquelles passe ce qui est encore un ruisseau, le Cher.
Cette commune (comme toute la région) peut paraître aujourd'hui 'au plus bas' : très faiblement peuplée (env. 15 hab./km2), vieillissante, sans force économique autre que l'agriculture, et souffrant surtout d'un manque de considération de la part de l'opinion générale, y compris des gens qui y vivent. Il faut dire qu'elle se trouve aux confins de la Creuse, un département lui même considéré comme les confins de la France. Le premier bourg (Auzances) est à 12 km ; la première ville à 35 km (Aubusson) ; Clermont-Ferrand est à 65 km. Il y avait encore une ligne de chemin de fer en 2008, avec une gare sur la commune voisine, dans laquelle s'arrêtaient 2 trains par jours.

La région a toujours été une terre plutôt pauvre, mais qui a tout de même connu son âge d'or au XIXème siècle, lorsque l'agriculture, qui organisait toute la vie rurale, rendait cette campagne indispensable dans la production agricole nationale. Mais les deux guerres mondiales ont saigné la population, la mondialisation a rendu ces territoires non compétitifs au niveau européen, et l'agriculture locale s'est alors spécialisée dans l'élevage bovin. Les agriculteurs, peu nombreux et vieillissants, se voient obligés de gérer des troupeaux de plusieurs centaines de bêtes, que peu de jeunes agriculteurs n'auront les moyens de reprendre.
Sur ce constat alarmant, il se pose nécessairement la question du devenir de ces espaces ruraux : comment vivra ce territoire dans une génération ?

Si l'image de cette commune incarne dans l'imaginaire collectif un archétype de la campagne (collines boisées, vallées embocagées, bâti ancien, etc...), il faut aujourd'hui s'interroger sur le sens de la ruralité dans un monde où le mode de vie urbain domine de manière hégémonique. Les campagnes les moins productives, comme les Combrailles autour de Chard, perdent petit à petit leur fonction agricole quantitative (la production massive de veaux, exportés en Europe pour l'engraissement puis l'abattage), pour acquérir par contre de nouvelles fonctions d'accueil et de récréation auprès des populations ayant un mode de vie urbain comme les néo-ruraux.

Le développement local ne passe donc plus par une intensification de l'agriculture, mais par l'amélioration du cadre de vie. Loin de disparaître ou de se muséifier, l'agriculture peut avoir une place centrale dans le projet de développement local : le défi pour ces territoires est de réinventer un modèle agricole qui soit justement le garant de ce cadre de vie, tout en étant rentable pour les agriculteurs.
Même si ils sont encore marginaux, quelques personnes viennent s'installer, ou expérimenter des pratiques innovantes : vente directe à la ferme, diversification des activités agricoles ... Dans cette région, chaque ouverture de commerce, chaque reprise de ferme, chaque nouvel habitant est une petite victoire.

Longtemps ignorées en milieu rural, les questions du paysage peuvent prendre aujourd'hui une place centrale dans le projet de développement local. C'est d'ailleurs l'ambition de ce TFE, qui espère autant initier une stratégie à large échelle (la communauté de commune) que de proposer des outils de projets qui viennent accompagner les pratiques agricoles, à travers l'intervention humble et respectueuse du paysagiste dans les gestes même des paysans. Les enjeux sont très large : accompagner une évolution inévitable de l'agriculture, maintenir un paysage capable de rendre cette commune attractive, relancer une activité économique locale, accueillir les nouvelles générations de gens qui feront vivre cette commune rurale.