Fil tendu entre Grenoble et l’agglomération lyonnaise, la vallée de la Bourbe devint en une quarantaine d’année « vallée urbaine ». Ses paysages de marais et canaux dessinés par l’action géologique des glaciers alpins et la main industrieuse de l’homme, cédèrent peu à peu leurs territoires au projet politique et urbain de la ville nouvelle de l’Isle d’Abeau.
Dans les années 70, sous l’aire d’influence de la dynamique lyonnaise, fut décidée la réalisation de ces territoires satellites « à la campagne », accueillant travailleurs et jeunes foyers écartés de Lyon par la pression foncière et à la recherche d’un cadre de vie plus rural. Pourtant de véritables villes s’établirent autour de petits noyaux villageois et le relief « insulaire » résiduel de l’Isle d’Abeau devint l’objet de grandes planifications et expérimentations de formes urbaines, s’étendant jusque dans la vallée et le coteau sud.
Un contraste de modes de vie urbains dans le contexte des paysages vallonnées du Nord Isère, s’illustrant entre autres, par les infrastructures de transports (Routes nationales RN6, Autoroutes A43, aires de péage et d’autoroute, ligne SNCF...) et les zones commerciales et d’activités s’établissant dans, ce qui fut encore il y a peu, des marais. Ainsi la ligne TER Grenoble-Lyon, souligne cette gradation d’urbanisation dans le paysage, de la Tour du Pin aux portes de Lyon, les séquences urbaines illustrent la dynamique de ce territoire. Sous l’attraction de l’activité lyonnaise, les ambiances rurales de petits villages cédèrent la place à une nouvelle génération de ville, aux extensions pavillonnaires et aux activités industrielles (carrières, usines, entrepôts...).
De cette vision du territoire naquit l’entité de “vallée urbaine”, son aménagement niant de plus en plus, son origine géomorphologique, celle de la vallée de la Bourbe. Canalisé, le cours d’eau tient son nom de la boue noire épaisse qui se dépose au fond des eaux stagnantes, étangs et marais dont la perception et la dynamique écologique de zones inondables s’effacent au profit de nouvelles installations (Zone d’Activité de la Maladrière, Médipôle...) et des étendues de maïs. Les petits canaux, alignements de peupliers, sont autant d’indice de la présence de l’eau, milieux humides, dont les contours sont esquissés par le léger dénivelé des coteaux. Une nuance dans la topographie, que le relief de l’Isle d’Abeau met en évidence par un resserrement de la vallée, son territoire s’étendant de part et d’autre de celle-ci.
La préservation d’espaces naturels dans la ville nouvelle était une des intentions du schéma directeur (SDAU), un équilibre entre les secteurs bâtis, au coeur des problématiques actuelles de densification des trames urbaines et de limitation de l’étalement urbain. Plus d’une génération après la réalisation de l’Isle d’Abeau, l’évolution de ce territoire et des politiques d’aménagement interroge quant au projet initial et à son évolution. Notamment autour du secteur de la gare, établie à l’époque pour les travailleurs sur Lyon et qui de nos jours, ne fait l’objet que d’une fréquentation aléatoire (desserte moindre de la ligne TER) et d’aucune implantation bâtie à proximité. Dans la tendance actuelle de densification autour des secteurs gare et d’augmentation de l’usage des transports en commun, ce site de la gare de l’Isle d’Abeau aux portes de Lyon et de l’Isère ne saurait rester en l’état actuel.
Un site en devenir donc, puisque diverses études (Urbagare, PLU, PADD, SCOT...) le désigne comme un des secteurs à enjeux de l’inter modalité et de l’évolution de la ville mais aussi de la Communauté d’Agglomération des Portes de l’Isère (CAPI), acteurs de ce territoire qui souhaitent exprimer le futur projet « du quartier de la gare » par la création d’une ZAC.
Ce site soulève ainsi de nombreuses problématiques actuelles telles que la valorisation des paysages de vallée, la forme urbaine de la ville campagne, l’évolution des Villes Nouvelles, les enjeux de mobilités de notre société et la gestion des territoires par des domaines de compétences variés (communauté d’agglomération, aire métropolitaine, région...). De même, ce projet est avant tout est porteur d’une fonction symbolique: trait d’union entre Lyon et Grenoble, mais aussi des territoires de la vallée urbaine du Nord Isère; d’une fonction urbaine : requestionner le schéma directeur et le maillage de la trame entre les différents secteurs de la ville, accessibilité au pole intermodal...et de fonctions environnementales : valorisation des milieux humides, gestion de la zone inondable...
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