Au cours de ces dernières années, l'approche écologique nous a conduit à imaginer de nouvelles relations entre la ville et ses espaces naturels. Le besoin de nature s'exprime de multiples manières, au travers du développement de parcs et de jardins ou par la valorisation d’espaces naturels emprunts d'un imaginaire apaisant, porteur de valeurs positives. Bien que les politiques valorisent aujourd'hui ces espaces, l’approche de certains milieux relève souvent du domaine de quelques initiés. Pour sortir de cet état de fait, il devient nécessaire de penser de manière globale le territoire d'une ville, en y intégrant les relations possibles aux espaces non urbanisés propices au développement d'une nature urbaine.
En introduisant le concept de la biodiversité, l'écologie a mis en valeur la nécessité de préserver et de valoriser les franges végétales confrontées à la minéralité urbaine. A l'heure du développement durable, quelle place occupe aujourd'hui la nature dans notre société ? Quelles relations les citadins entretiennent-ils avec les espaces naturels ? Entre espace de détente et vocation écologique, quel rôle pourrait assurer un espace naturel sensible au sein d’un contexte urbain dense ? C’est à l’ensemble de ces questions que mon travail de fin d’études souhaite apporter des solutions à partir d’un site confronté à cette problématique.
Au nord-est de Paris, le département du Val d'Oise est jalonné par une série de buttes. En partie propriété de l'Agence des Espaces Verts d'Ile de France (AEV), ce territoire est classé Espace Naturel Sensible au Plan Local d'Urbanisme des cinq communes qu'il regroupe. L'ensemble des buttes du Parisis représente une surface de plus de 500 ha gérée par l'Agence des Espaces Verts (AEV). La butte d'Orgemont, qui sera le site de mon mémoire, s'inscrit donc dans une logique globale, tant géologique, écologique, qu'urbaine.
Réservoir naturel de gypse perché au-dessus du territoire, les buttes sont à l'origine du développement de nombreux villages, où les cultures viticoles et maraîchères ont pu se développer. Mais l’avènement du chemin de fer et de l'industrie va modifier irrémédiablement la relation que la ville portait à ses espaces naturels et agricoles. Durant la période charnière des années 1850-1930, le quartier d’Orgemont va représenter alors l'idylle de la vie à la campagne, entre guinguettes et promenades. Cependant, la villégiature sera rapidement supplantée par l'exploitation industrielle des carrières, qui induira le remaniement complet du relief des buttes. L'entre deux guerres révèle une mutation profonde de la ville d'Argenteuil, dont les conséquences se ressentent sur le quartier d'Orgemont. L'urbanisation se ramifie depuis les quartiers de la gare pour épouser les reliefs, jusqu'aux limites de la carrière. Le développement urbain, à la fin des années 1930, engendre la création de la cité-jardin d'Orgemont, puis la construction de la cité Joliot-Curie en 1958.
La butte d'Orgemont marque aujourd'hui la limite Est d'Argenteuil. Séparée du cœur de la ville par les infrastructures autoroutières et ferroviaires, elle souffre de son enclavement. Cet espace naturel inclus dans un ensemble plus vaste que sont les buttes du Parisis, implique de travailler les connexions possibles entre ces diverses unités. Grâce au développement du RER et très prochainement d'une nouvelle ligne de tramway, la butte d’Orgemont est à deux pas de la capitale. Il s'avère donc nécessaire de penser à la gestion, à la fréquentation d’un tel espace et plus largement au devenir d'un espace naturel au sein d'un bassin fortement peuplé. Cette réflexion se pose également quant à l'ouverture de la butte sur ses quartiers et à ses riverains. Bien qu’elle représente un obstacle pour les populations situées de l'autre côté de l'autoroute, la création du parc naturel d'Orgemont pourrait conduire à une réflexion globale à l’échelle du quartier.
La butte d'Orgemont répond également à un système écologique et géologique complexe, qui est aujourd'hui désigné sous le nom d'Espace Naturel Sensible (ENS). Cette appellation s’inscrit dans une logique qui vise à l'ouverture des sites au public tout en y favorisant la conservation de la biodiversité par un système de connexions entre les espaces naturels. Cependant, la désignation d'ENS peut sembler paradoxale, dans le sens où les buttes du Parisis résultent d'un remaniement profond de la structure même des sols. Ces espaces assurent aujourd'hui des rôles écologiques indéniables vers lesquels les villes veulent se tourner pour offrir une nouvelle qualité de vie. Balcon ouvert sur la Seine, la butte d'Orgemont possède ce potentiel inestimable, qu'il s'agira de valoriser dans le respect des milieux.
Dans ce contexte urbain complexe de plus de 200 000 habitants, comment favoriser le développement d'une diversité faunistique et floristique ? Comment redonner une identité aux buttes du Parisis, et obtenir ainsi un espace homogène dans ses liaisons et ses fonctionnements ? Le «parc naturel urbain d'Orgemont» pourrait-il être une articulation entre la ville et son quartier et marquer ainsi le début d'une réflexion générale sur l'ensemble du Parisis ? Entre sensibilisation et mise en valeur, quel est le devenir des buttes d'Orgemont ?
|