L’initiative de mon travail de fin d’étude émane d’une proposition faite par une étudiante en architecture de travailler sur un sujet de diplôme commun ; tous deux convaincus que l’architecture fait partie du paysage et que les notions de nature et d’écologie doivent faire corps avec un bâtiment et son site. L’articulation des deux disciplines doit permettre au lieu de trouver son équilibre naturel et durable.
C’est la base du sujet de diplôme qui va suivre et de l’analyse à la conception, les deux regards doivent enrichir la démarche de projet.
Les villes nouvelles d’après-guerre, aussi appelées Grands ensembles, et souvent créées ex-nihilo, font aujourd’hui partie intégrante du paysage français et sont au cœur de nombreuses problématiques connues et souvent sans solution. Reléguées en second plan des problématiques urbaines pendant de nombreuses années, elles sont revenues progressivement et plus particulièrement aujourd’hui au cœur des débats sur la formation des villes.
Le lieu d’étude est un exemple prédominant de ces Grands ensembles. Il se situe dans la banlieue Toulousaine, de l’autre côté du périphérique par rapport au centre ville, au pied du plateau qui domine la vallée de la Garonne. 70% des logements de cet ensemble sont des logements sociaux.
Dans les années 60, naît l’idée du Mirail ; une ville dans la ville, de 40 000 habitants, composée de trois quartiers au sud-ouest de l’agglomération. Un concours est organisé puis remporté par trois architectes : Candilis, Josic et Woods, membres du groupe de recherche « Team Ten ».
Les principes fondamentaux, novateurs encore aujourd’hui, dessinent une ville aux accents utopiques devant favoriser le lien social, l’épanouissement de l’être et les déplacements dans la cité. Un lien intime entre nature et architecture est affirmé dans ce que l’on pourrait appeler un parc habité.
Les idées nouvelles sont appliquées à la première tranche de construction du quartier de Bellefontaine, mais, auront toutefois du mal à se maintenir sur les deux autres quartiers (Reynerie et Université). Au fil des années, les auteurs se heurtent à des réalités administratives, politiques, sociales et constructives obsolètes et peu favorables à la réalisation soignée et totale du projet initial. Le fait est que l’équipe aura du mal à accompagner la réalisation jusqu’à son terme et le projet, on peut le dire, reste inachevé ou du moins « mal achevé ».
Aujourd’hui, il faut reconnaître que, comme dans beaucoup de villes françaises, ces quartiers et leurs habitants subissent une mauvaise image véhiculée par les actes d’une minorité d’entre eux portés par les médias et les « on-dit ». De plus, deux décennies de politiques parfois maladroites et inappropriées ont eu raison des capacités sociales et créatives de ces lieux. Les dégradations matérielles et morales du quartier ont participé à sa stigmatisation progressive. Le quartier s’essouffle et les gens sont gagnés par la fatigue, le désarroi et la colère, alimentés par une intégration fragile.
C’est alors qu’intervient en 2002 la mise en place du Grand Projet de Ville (GPV) et la réhabilitation des zones urbaines sensibles (ZUS) de la ville de Toulouse à travers trois volets : urbain, social et économique. Avec ce projet naît l’espoir que des mesures à l’échelle du problème soient prises pour améliorer le quotidien et l’image des « quartiers ». Jusqu’à aujourd’hui, plusieurs années de politiques de la ville n’auront pas eu de grands effets sur l’amélioration des conditions de vie au Mirail et, finalement, les efforts sont dérisoires sur tant d’années si on les compare aux sommes engagées sur le reste de l’agglomération. Conscient que le volet urbain n’est définitivement pas le seul remède aux problèmes des quartiers, l’amélioration qualitative du cadre de vie favorise cependant la fierté d’appartenance à un lieu et le sentiment d’être considéré et pris en compte en tant qu’habitant d’une ville et citoyen. Ce volet est aussi la partie la plus visible et la plus palpable du GPV.
Face à ces données, l’étude cherchera dans un premier temps à révéler la situation géopolitique, sociale, économique et historique de ce territoire depuis la création à nos jours.
Comment en est-on arrivé à un tel fossé entre les principes initiaux des architectes et les réalités actuelles ? Dans quelle mesure le projet urbain, architectural et paysagé peut-il améliorer cette situation ?
Dans un deuxième temps, le travail portera sur la réhabilitation de la rue de Kiev dans le quartier de la Reynerie et de l’espace public en lien avec l’architecture et les immeubles d’habitation. Comment imaginer une solution autre que la résidentialisation pour ce quartier ? Peut-on créer des espaces autogérés appropriables, utiles aux habitants, respectueux de l’existant et des principes originaux qui ont façonné ce patrimoine ? Comment intégrer les problèmes environnementaux actuels et concevoir un projet porteur de solutions ? |