Situées dans la Vienne, à l'écart des grandes régions thermales françaises, les sources de La Roche-Posay, aux propriétés chimiques reconnues depuis le XVIe siècle, alimentent aujourd'hui deux établissements thermaux, spécialisés dans le soin dermatologique. Les cures de la station thermale de La Roche-Posay s’adressent essentiellement aux personnes atteintes de pathologies graves : eczéma, psoriasis, cicatrices de brûlure ou cicatrices accidentelles, ayant souvent de lourdes répercussions sur la vie quotidienne.
Au début du XIXe siècle, la cure était réservée à une clientèle aisée et témoignait d’une vie mondaine organisée autour des grands hôtels et des thermes. Depuis, les grandes évolutions en matière d'avancée sociale, avec notamment la création de la Sécurité Sociale, ont entraîné une profonde mutation du thermalisme. La cure, alors prescrite par le médecin, répond aux besoins d'une nouvelle population et constitue désormais une alternative thérapeutique qui allie éducation, prévention et soin.
Les thermes de La Roche-Posay sont au coeur de l’activité de la commune depuis plus d’un siècle. Impossible en effet de parler du développement de la station sans évoquer ses activités thermales. La Roche-Posay, petite ville de presque 1500 habitants, peut héberger jusqu'à 9000 curistes par an et présente tous les équipements dont ont pu se doter les stations thermales françaises : balnéothérapie, hippodrome, casino, golf.
Peu à peu, les médecins prennent conscience de l'importance de l'environnement thermal. On s'aperçoit que parallèlement à la cure, la détente, le repos, la distraction et l'apprentissage d'une nouvelle hygiène de vie, autrefois négligés, sont des facteurs déterminants pour l'évolution de la pathologie. Pour répondre à ces nouvelles attentes, il a fallu proposer aux curistes des activités abordables : randonnées VTT, escalade, visites du patrimoine rochelais, etc... Pourtant, et paradoxalement, le curiste comme l'habitant de La Roche-Posay trouvent peu d'aménagements publics de détente ou de loisirs. Une fois que l'animation est terminée, que reste-t-il alors de l'environnement thermal ?
Dans l’imaginaire collectif, La Roche-Posay est assimilée à l’activité thermale. Cependant, en venant à La Roche-Posay, on s’aperçoit vite que la ville et les thermes sont loin de représenter une «ville thermale» proprement dite, mais plutôt «une ville avec des thermes». En effet, la ville a tissé une relation très ambiguë à l'eau ; par endroits, elle la protège, la puise, l'exploite précieusement, ailleurs, elle la rejette, la gâche, l'oublie. Ce constat témoigne d'une grande disparité entre la gestion de l'eau riche des thermes, et celle des autres, des eaux qu'on laisse courir, des eaux sans intérêt. Et pourtant, en contrebas de la station, un ancien moulin et un ancien barrage témoignent que l'«eau simple » peut, elle aussi, révéler ses richesses si l'on y prête attention.
Les établissements thermaux inscrivent fortement leur présence dans le territoire rochelais, sans jamais en faire réellement partie. Les grandes plantations de résineux en monoculture qui s'étendent sur le champ captant des puits afin de préserver la qualité des eaux, d'accès strictement contrôlé, en sont l'exemple le plus visible. On remarque moins le filet d'eau que les thermes libèrent, assimilé aux eaux de ruissellement qui cheminent discrètement entre les rues avant de se déverser dans la rivière. S'ouvrir au public, prendre en compte son environnement, cette politique n'est pourtant pas étrangère à la Société Thermale. Dans les années 1990, l'initiative d'ouverture du Parc Thermal aux visiteurs avait été accueillie avec enthousiasme. Pourtant, malgré ces efforts, les thermes ne parviennent pas à tisser ce lien avec la ville, qui donnerait à La Roche-Posay cet environnement thermal qui lui manque, et qui offrirait aux établissements cette ouverture aux loisirs et aux activités extérieures, espace lien, lien social entre le curiste et l’habitant. Comment créer cet échange entre les thermes et sa ville, entre la ville et ses thermes, pour que «La Roche-Posay-les-Bains», comme on l’a appelée à la Belle époque, trouve une cohérence urbaine et sociale ?
Quelle est la place du curiste dans une ville qui n'est pas la sienne ?
Quelle est la place de l'habitant dans une ville thermale ?
La ville et les thermes sont-ils prêts à repenser leur gestion pour un territoire partagé ?
La Roche-Posay présente tout le potentiel pour devenir une véritable « ville thermale ».
La Roche-Posay[-les-Bains], c'est un travail sur ces espaces mis entre parenthèse, autour de la valorisation et de la gestion durable des eaux de La Roche-Posay, de l'averse à la rivière. Une réflexion autour du jardin thérapeutique, de l'apprentissage de soi-même, de la différence et contre l’indifférence, pour que le soin dépasse les thermes et que l'habitant accède à un véritable environnement thermal. Créer des espaces d'activités et de découvertes pour oublier un instant la thérapie et apprendre à guérir, support d’activités pour les animateurs, espaces de détente et de jeux pour tous. Espaces rencontres et d’échanges, contre l'isolement et l'ennui. Espaces partagés tout au long du parcours de l’eau, comme un parcours vers la guérison. |