Directrice de mémoire : Marie Pruvost
Redonner une identité à la ville par ses espaces publics, Château-Thierry (02).
La ville de Château-Thierry est positionnée aux confins de la Picardie. Loin de posséder un caractère picard, l’agglomération s’apparente au territoire francilien de part son architecture, ses infrastructures et à la Champagne grâce à son vignoble.
C’est au détour d’un méandre de la Marne que la cité s’est établie. Tout d’abord, un château est construit sur une butte contrôlant les grandes routes commerciales avec en contrebas près de la rivière une ville encerclée de remparts. Au Moyen-Age, l’axe Nord-Sud perd de son importance au profit de la voie navigable menant à Paris, qui permet d’alimenter la capitale en produits agricoles issus de la vallée. Progressivement la Marne est canalisée, le sud de la ville devient un marais puis un bras « la fausse Marne » est créé. A partir de 1849 et l’ouverture de la ligne de chemin de fer Paris-Strasbourg, se développe un nouveau quartier au sud du vieux faubourg de la Marne. Des commerçants parisiens prenant leur retraite viennent y construire des habitations bourgeoises. A partir du XXème siècle sur la nouvelle île, l’entreprise Belin s’installe puis sur les anciens méandres des boites monochromes sans âmes s’implantent. Château-Thierry se coupe dès lors de ses villages et de ses espaces agricoles.
Aujourd’hui, la proximité de l’Ile de France et du bassin rémois influence la croissance démographique et explique les importantes navettes domicile-travail. La présence au Nord de l’A4 et de la RN3, au Sud de la voie ferrée, ramène la ville à 45 minutes de Paris. Cette proximité de la capitale et le prix du foncier séduit d’une part de nouveaux actifs travaillant sur Paris, Meaux, Saint-Denis mais aussi Reims, Épernay et enfin Soissons. D’autre part les infrastructures attirent l’implantation d’entreprises de logistiques au Nord. Ce phénomène produit un grignotage des terres agricoles et l’implantation d’immenses parkings autour de la gare. L’urbanisation touche les villages, l’agglomération s’étage et prend une forme d’amphithéâtre. La ville quitte son histoire liée avec la Marne pour s’installer sur le plateau Nord, frôlant l’autoroute.
L’aire urbaine avec ses 32 000 habitants reste de taille limitée mais rayonne sur les villages et les hameaux de la Marne. Château-Thierry possède en somme tous les atouts d’une grande ville (hôpital, gare, ancien tribunal, sous-préfecture, lycées….) avec une proximité de la campagne verte et riante. Depuis les rues et les anciennes maisons bourgeoises des points de vues portent le regard sur les coteaux striés par la vigne et le monument américain de la cote 204, lieu de mémoire des batailles de la Marne. Pourtant, en se promenant dans la ville il y règne un sentiment d’absence, on ne sait pas si la ville à rêvé de grandir ou si elle a enflé malgré elle. Les bâtiments souvent d’une grande qualité architecturale aux couleurs d’ocres ne sont pas mis en avant. Le quartier de la gare s’écroule sous le poids de l’histoire tandis que les entrées de ville banalisent celle-ci.
La croissance de la circulation automobile de l’agglomération à cantonnée les espaces publics à une image purement fonctionnelle, au détriment de la vie locale et du cadre bâti. Les espaces ouverts présent dans le cœur historique et proche de celui-ci deviennent des lieux de stationnement. Il convient de retrouver les innombrables pratiques de la vie urbaine : commerce, marché, détente, transports en commun, rencontre… Ce sont ces lieux qui permettront à la ville de se forger son image et son identité.
Alors que de nombreuses villes ont entrepris des actions efficaces de reconquête de leurs espaces publics et certaines d’entre elles ont maintenant acquis un savoir-faire, il importe d’apporter à Château-Thierry le fruit de cette connaissance. Il est nécessaire de structurer ces espaces situés à proximité les uns des autres.
Hier, Château-Thierry possédait une mauvaise réputation : ville embourbée dans les bouchons, image vieillotte, espaces publics désuets datant des années 70, chômage et manque d’animation. Depuis peu, l’agglomération lutte contre cette image et a débuté une politique d’amélioration du cadre de vie en travaillant sur un embellissement du centre-ville. Elle mise aussi sur le tourisme en diversifiant l’offre ( aigles du château, maison de La Fontaine, nouveau musée de l’Hôtel Dieu ).
Ce mémoire compte apporter une nouvelle vision de ce territoire alors même que la Communauté de Communes de la Région de Château-Thierry vient de se porter acquéreur de terrains proches de la gare et qu’un SCOT va être réalisé.
Dès le premier abord des questions se posent pour cette antichambre de l’Ile de France :
Comment créer une identité forte à l’agglomération de Château-Thierry ?
L’expansion urbaine se tournant vers le Nord quel avenir pour le territoire sud, comprenant déjà une friche de RFF ? Quelle requalification des espaces publics ? Comment transmettre l’histoire de l’époque industrielle ? Comment retrouver un lien avec le lit de la Marne ?
Quel avenir pour une ville à la campagne ? Comment attirer et retenir le tourisme sur la région ?
Comment éviter que Château-Thierry se transforme en cité dortoir ou ville de passage ?
L’un des objectifs de ce mémoire tend à mieux définir la notion de déplacement. Il vise à comprendre par l’exemple de Château-Thierry les phénomènes de mobilité quotidienne (présent notamment dans les espaces publics de la gare et au Nord de la ville) et les phénomènes de migration résidentielle (induite par le prix du foncier en rapport avec la proximité de Paris).
Deuxièmement, il vise à créer un véritable réseau de places publiques rendues au piéton. Enfin, ce projet aura pour but de rétablir la ville dans la plaine alluviale de la Marne.