Lundi 23 septembre, nous recevions à la Chocolaterie les premières rencontres territoriales de l’alimentation en Région Centre Val de Loire. Une centaine d’acteurs locaux, élus, agriculteurs, techniciens, propriétaires privés, acteurs de la restauration collective, animateurs de réseaux agricoles, étudiants… réunis pour partager une envie générale de relocalisation alimentaire. Des échanges riches, des visions différentes et des envies communes, des engagements, autour de la question centrale de l’organisation.
Cette réflexion, portée par le Pays des Châteaux et la communauté d’agglomération de Blois Agglopolys, prend racine dans un contexte plus général. En effet, depuis la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt du 13 octobre 2014 (Art 39), les collectivités décentralisées sont incitées à penser des projets alimentaires territoriaux, en s’appuyant sur un diagnostic de la production agricole locale, la structure des réseaux de logistique et de transformation et du besoin alimentaire du bassin de vie. L’agglomération blésoise est très intéressante à ce propos, car elle présente l’avantage d’être à la fois un bassin de consommation suffisamment structurant pour des dynamiques de filières locales et un bassin de production diversifié offrant une large gamme de produits alimentaires. Par ailleurs, depuis le Comice Agricole de Marolles en 2008, de nombreuses politiques publiques locales ont été mises en place sur le sujet (réalisation d’une étude sur les filières biologiques et les circuits courts, mise en place de l’Observatoire de l’Agriculture par le SIAB, création de la couveuse en maraichage bio Les Prés d’Amont, installation de maraichers bio en agriculture urbaine sur la Vacquerie, valorisation des producteurs locaux sur les marchés, vente directe auprès des producteurs, etc.) De plus, le Pays des Châteaux est depuis peu devenu territoire-pilote d’un projet de recherche-action, sur le sujet de la gouvernance alimentaire, porté par l’association International Urban Food Network (IUFN).
En février 2019, le Pays des Châteaux a été lauréat de l’Appel à projet du Programme National pour l’Alimentation 2018-2019. Cette labellisation par le Ministère de l’Agriculture permet de valoriser ces initiatives et d’imaginer une approche stratégique plus globale. Renouveler l’alimentation à une échelle territoriale questionne les acteurs locaux de manière transversale ; car c’est bien tout le processus qui est en jeu : de la ressource naturelle et foncière à la production agricole, les logiques économiques de la valorisation et du transport des denrées alimentaires, les lieux de vente, d’achat, de consommation, les habitudes alimentaires, le recyclage des matières. Cette réflexion implique de très nombreux acteurs locaux, tant producteurs que consommateurs, tant privés que publics, tant individuels que collectifs, et soulève de nombreux champs de compétences souvent cloisonnés (filières agricoles, restauration collective, grande distribution, foncier, logistique et transport, installation agricole, qualité du sol et de l’eau, pédagogie et diététique, recyclage, etc.). Depuis plusieurs années, l’école de la nature et du paysage accompagne le Pays des Châteaux, et à travers eux les acteurs locaux dans la naissance de cette politique territoriale. Quels scénarios imaginer pour l’émergence d’un conseil local de l’alimentation ? Plus précisément, comment notre organisation dans un futur proche influencera les capacités alimentaires du territoire en fonction de ses paysages ?
Lors de cette journée, les élèves de l’école présentaient leurs propositions aux invités. Ici, le paysagiste intervient au début de ce processus, à la naissance d’une politique publique qui aura de nombreux impacts sur l’espace physique des lieux. Il participe à l’émergence d’une commande. Il dessine les conditions humaines de la transformation des paysages à venir. Pour un paysagiste, le dessin des politiques publiques utilise les mêmes mécanismes que le dessin du plan d’aménagement, c’est-à-dire une attention très fine à ce qui est déjà-là, latent, invisible ou ostentatoire, et il utilise pour cela la qualité de l’enquête. En reconnaissant les lieux, il reconnait en même temps ceux qui, par les gestes de leur travail, transformeront concrètement les espaces habités. Il organise une action collective et complexe, décloisonnée et ouverte sur le futur. Enfin, il tente de représenter, par des moyens de communication parfois détournés, les effets de cette organisation collective, sur les paysages, sur la vie quotidienne, sur les organisations politiques, sur les processus de décision, sur les habitudes de consommation, sur ce qui, finalement, mettra en mouvement le monde, même s’il reste très local.
Les élèves avaient d’abord rencontré de nombreux travailleurs dans le cadre de leur travail : champs, administrations, ateliers de transformation, serres, bureaux, boutiques. Puis, de manière collective, ils ont imaginé des scénarios d’organisation politique, en donnant corps à la fois aux missions, à la composition, aux règles de fonctionnement d’un futur Conseil Local de l’alimentation. Enfin, ils ont inventé des outils à destination des acteurs locaux, qu’ils remettent immédiatement en discussion auprès d’eux.
Télécharger les travaux de l’atelier Paysage et projet de territoire :